Käthe Kollwitz — Regard(s) croisé(s)

Ce volume collectif est issu du premier colloque français consacré à Käthe Kollwitz, alors que l’historiographie se développe surtout en Allemagne et aux États-Unis. Le principal enjeu en est de sortir du domaine des spécialistes de l’estampe et de faire d’une lacune, le peu de développement de la recherche sur Kollwitz en France, un potentiel heuristique. Le parti-pris était en effet d’ouvrir le propos du colloque hors du champ de l’estampe allemande, de proposer une lecture croisée de l’œuvre de Kollwitz, en invitant non seulement des chercheuses et chercheurs en histoire de l’estampe et en histoire de l’art, mais aussi en histoire de la photographie, en histoire culturelle ou en études germaniques. Chacun considérant Kollwitz sous l’angle de ses connaissances mais aussi des objets et méthodes propres à sa discipline, leur confrontation permet ainsi de renouveler la recherche sur l’artiste.

Date de publication : 19 août 2022
Format : 16 x 20 cm
Poids : 680 gr.
Nombre de pages : 424
ISBN : 978-2-85035-065-8
Prix : 25 €

Trois lignes forces structurent l’ensemble des contributions de ce volume. La première interroge les fonctions de l’image dans l’œuvre de Kollwitz, à travers l’expressivité des sujets qui, avec récurrence ou au contraire de manière plus marginale, sont chargés d’une signification symbolique, dans le champ artistique ou l’espace social, et jusque dans la pénombre discrète voire secrète de l’atelier, en explorant les potentialités de la gravure, de la photographie ou de la sculpture dont l’artiste a été la praticienne.
La deuxième voie d’approche examine la situation de Kollwitz face à l’histoire, en éclairant la confrontation de l’artiste aux combats et violences de son temps, qu’elle vécut dans un enthousiasme parfois inquiet (la révolution allemande) ou qu’elle subit dans la douleur (la mort d’un fils tué à la guerre, dès l’automne 1914, la convertit au pacifisme), cependant qu’à partir de 1933 le nazisme lui retirerait ses droits d’artiste et d’enseignante en la plongeant dans la nuit de l’art décrété dégénéré.
La troisième et dernière partie de l’ouvrage réunit des essais interrogeant la portée de l’œuvre de Kollwitz, en s’intéressant à ses réceptions et ses lectures comme autant d’interprétations qui, parfois, croisent d’autres destins d’artistes, tels George Grosz ou Lea Grundig, et qui varient selon des contextes changeants : l’engagement de l’artiste dans l’Allemagne des années 1920, sa postérité dans la RDA d’après 1945 ou les significations de la monumentalité de son œuvre dans les régimes d’idéologie communiste.

Contributions de : Aurélie Arena, Claire Aslangul-Rallo, Jérôme Bazin, Annette Becker, Marine Branland, Jean-Numa Ducange, Thierry Dufrêne, Marie Gispert, Christian Joschke, Philippe Kaenel, Morgane Lafagne, Juliette Mermet, Denis Pernot, Emmanuel Pernoud, Chiara Ripamonti, Bertrand Tillier, Catherine Wermester.

Ouvrage publié avec le concours du Centre allemand d’histoire de l’art et du Centre de recherche HiCSA, université Paris-I-Panthéon-Sorbonne.

Presse

Jean-Paul Gavard-Perret, Le salon littéraire
Yves Tenret, Bon pour la tête

Extraits

Reconnue à la fois en République démocratique allemande (RDA) et en République fédérale (RFA) – pour des raisons bien évidemment différentes – puis dans l’Allemagne réunifiée, reçue aux États-Unis dès les années 1930 d’abord sous le prisme de l’expressionnisme, puis, à partir des années 1960, sous celui du féminisme, Kollwitz a ainsi longtemps été mentionnée en France sans être vraiment connue, et moins encore reconnue. Elle a fait partie d’un certain imaginaire, historique, politique, mais sans vraiment faire l’objet d’études monographiques susceptibles de rivaliser avec l’abondante historiographie allemande, ni même d’en intégrer les résultats.
Les séjours que fit Kollwitz à Paris au début du XXe siècle, tout comme la réception dont elle fut l’objet au sein des cercles d’amateurs d’estampes dans les années 1910 et au sein des cercles pacifistes et d’extrême-gauche dans l’entre-deux-guerres auraient pu en augurer autrement. Les raisons qui ont alors empêché sa pleine reconnaissance – sa nationalité allemande, sa prédilection pour le médium graphique, son genre – sont autant de pistes pour comprendre ce que l’on pourrait considérer comme une exception française dans la réception de Kollwitz à l’étranger.

(Marie Gispert et Bertrand Tillier, « Croiser les regards autour de Käthe Kollwitz et son œuvre »)

Squiggle

Chaque volume monographique de cette collection suit un artiste dans son « tracé libre », selon la formule par laquelle J.-B. Pontalis traduit l’intraduisible mot anglais squiggle. Jeu de dessin à deux que pratiquait le psychanalyste D. W. Winnicott avec ses patients enfants, le squiggle instaurait une atmosphère de communication spontanée. Entendu dans une acception élargie, il nommera ici l’espace ménagé dans chaque œuvre au dialogue, à l’imprévu, à l’inconnu.