Au Vif de la peinture, à l’ombre des mots

Recueil complet des écrits sur l’art (1971-2015) du peintre GTC. Plus de trente années de réflexions sur l’art sont ainsi assemblées, depuis ses premières « notes d’atelier » jusqu’à ses écrits récents consacrés à des peintres proches (JP Pincemin, E. Leroy…). Ses ouvrages sur la gravure, sur Chardin, sur Munch sont aussi repris, ainsi que les entretiens qu’il donna tant à la presse spécialisée qu’à des magazines d’art. Préface de Roland Recht.

Date de publication : 22 août 2016
Format : 16 x 20 cm
Poids : 1100 gr.
Nombre de pages : 744
ISBN : 979-10-92444-44-5
Prix : 30 €

Roland Recht :
Les écrits de Gérard Titus-Carmel ici réunis s’étendent sur 45 années durant lesquelles il s’est simultanément livré à une intense activité de peintre et de graveur. Sans doute ne pense-t-il pas à l’écriture lorsqu’il peint, mais ses écrits, eux, témoignent d’un objectif constant : comprendre, non pas dans l’expérience quotidienne du geste mais à l’aide des mots que ce geste suscite, de quoi la peinture et la gravure sont faites. Revenir chaque jour devant la « hautaine inaccessibilité de la peinture », pour tenter néanmoins de l’interroger, et chercher aussi à saisir ce qui, en elle, ne satisfait pas absolument. Dans l’acte de peinture, une part de la chose qui sert de modèle, se dérobe, d’où naîtrait le désir de la saisir avec d’autres moyens. Mais ces moyens eux-mêmes qui sont les mots de la langue, ouvrent à leur tour sur de nouveaux mondes, lesquels demandent, exigent impérativement que l’auteur s’y attarde. Et il est clair, en lisant Gérard Titus-Carmel, qu’il y a chez lui une jouissance de l’écrit aussi intense et aussi vitale que celle qui accompagne son travail de peintre.
(…)
Les écrits de Gérard Titus-Carmel témoignent d’une activité théorique : ils sont le produit d’une réflexion à partir d’œuvres du passé ou de notre temps, mais aussi à partir de sa pratique artistique propre. Ces écrits font en quelque sorte retour sur sa pratique de la peinture. Et puis c’est toute l’histoire de la peinture qui se trouve sollicitée. Les textes qu’on va lire ont été écrits dans ce lieu singulier où s’entrecroisent les œuvres d’Edvard Munch, de Bram van Velde, de Matthias Grünewald, de Picasso, de Chardin, de Jean-Pierre Pincemin, parmi bien d’autres, et de Gérard Titus-Carmel. En plus de l’érudition sans faille dont témoignent les essais sur L’Indolente d’Orsay, ou sur La Raie de Chardin et le Portrait de Richelieu de Philippe de Champaigne, il procède à une sorte de déconstruction progressive du tableau. Le peintre Gérard Titus-Carmel s’intéresse autant à ce que le tableau donne à voir, qu’à ce qu’il recouvre. Il n’y a plus que les mots pour remémorer tout ce qui est à présent rendu invisible.

Ouvrage publié avec le concours du Centre régional du livre de Picardie et de l’Abbaye de Saint-Riquier.

Les auteurs

Gérard Titus-Carmel est né en 1942. Après des études de gravure à l’école Boulle, il s’affirme comme dessinateur et graveur. Travaillant par série autour d’un objet ou d’un thème, il analyse d’abord les processus de décomposition ou d’usure d’une forme. À partir de 1972-1973, il élabore lui-même le "modèle" que réclame son travail : petit coffret, nœuds, épissures, constructions de branchages sont fabriqués pour satisfaire le plaisir de dessiner, une dialectique inédite se trouvant ainsi instaurée entre la série et son référent. Dans les années quatre-vingt, Titus-Carmel revient à la peinture, procédant toujours par ensemble : Caparaçons, 1980-1981 ; Éclats, 1982 ; Nuits, 1984 ; Extraits & Fragments des Saisons, 1989-1990 ; Forêts, 1995-1996 ; Nielles, 1996-1998 ; Sables, 1999 ; Quartiers d’Hiver, 1999-2000. Il y déploie des ressources techniques s’autorisant toutes les libertés pour épuiser son prétexte avec une assurance formelle et chromatique remarquable. Il a illustré nombre d’ouvrages de poètes et d’écrivains, et il est lui-même auteur d’une cinquantaine de livres : récits, essais, recueil de poèmes, écrits sur l’art.

Presse

Entretien de GTC avec David Collin (Radio suisse romande, Espace 2, émission « Versus-Lire »).

Articles de Rodolphe Cosimi (« Critique d’art »), Antoine Emaz (« Poezibao »), Antoine Emaz (« CCP »), Fabien Ribery (« L’Intervalle »), Lucien Wasselin (« Recours au poème »).

Extraits

Mes textes ne sont pas des notes de travail. Ils ne sont pas écrits après coup, ce sont des productions corollaires. Ils se font dans d’autres lieux, parallèlement. C’est une espèce de discours sous-jacent au travail ; ils n’en sont ni l’explication, ni la description, ni le projet ; ils sont greffés, entés sur le travail en cours, qui continue à se déplier par ailleurs inexorablement. Ils sont dans un autre champ, de l’autre côté. Je n’écris pas sur mon travail, mais l’écriture mord sur la même chose. Ce sont gens de la même famille mais qui ne se voient pas, ne se rencontrent pas… ça mange la même chose, mais pas aux mêmes heures, pas au même râtelier… (1976)

(…)

J’ai exprimé maintes fois mes doutes quant à la fameuse passerelle que l’on pense devoir obligatoirement jeter entre les arts, si même elle n’est pas entendue d’emblée comme naturelle, voire consubstantielle à un projet commun. Il me semble pourtant que le mode d’investigation, autant que les outils qu’obligent leur travail – spécifique pour chacun d’eux, c’est le moins qu’on puisse dire – commandent une pratique, j’allais dire une posture, qui les dissocient essentiellement en engageant la pensée sur des chemins qui, pour être souterrainement liés par la bien commode « communauté d’enjeux » à laquelle on les suppose appartenir, les tient à bonne distance les uns des autres, même si l’on convient de l’effet d’une certaine porosité, au moins en ce qui concerne les intentions, entre les arts dits « plastiques », la poésie et la musique. D’ailleurs on constate qu’il y a comme un silence, ou une mise en veille, qui s’installe dès que l’un prend la parole exigeant d’occuper totalement le terrain, au mépris de toute perspective étrangère à son champ d’action. La poésie est forte quand elle s’attaque au langage, quand elle traite du langage et de son rêve ; la peinture est forte quand elle creuse profond au sein du dispositif de la forme et de la couleur (notez que je n’ai pas dit : des couleurs). Aussi, quand j’écris, je ne pense qu’à l’écriture et à ses gouffres, ce qui me semble aller de soi. Quand je peins, je suis tout entier tourné vers la peinture et à la forme que prend, dans son langage, son aventure, même si l’autre (l’auteur, l’homme aux mains propres) en surveille le déroulement depuis la rive d’en-face. Je ne suis donc pas « le peintre-qui-écrit », pas plus que je suis devenu « le poète-qui-peint-aussi ». Un être double, peut-être, un duo complice en un seul corps – une présence, disons, mais qui conforte son soupçon d’exister dans la connivence de deux voix distinctes, pratiquées de conserve, chacune en « retour d’écho » de l’autre. Mais pas de pont ; seule une langue secrète les relie, que je suis condamné à entendre et à manœuvrer seul, et qui franchit le fort courant qui les sépare, mouillant différemment leur berge. (2015)

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Écrits d’artistes

Passé le moment des avant-gardes, la discussion sur l’art est abandonnée aux professionnels du discours, et l’on oublierait presque que les artistes sont les premiers à penser leur pratique, que la peinture et la sculpture pensent. Réflexions, propos, notes, journaux, correspondances ou entretiens : la collection « Écrits d’artistes » entend actualiser ce fonds d’une grande richesse, bien souvent ignoré, pour donner à entendre la voix des praticiens de l’art.

Once the moment of the avant-garde is gone, discussions on art are left to the speech professionals. Then, one could nearly forget that artists are the first to consider their practice, that painting and sculpture think. Reflections, remarks, notes, diaries, correspondences or interviews : the collection “Writings by artists” aims to update this considerable fund, frequently ignored, to give a voice to the practitioners of art.

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